Vercingétorix....Quel héros par Toutatis !

Vercingétorix....Quel héros par Toutatis ! > De la découverte de Vercingétorix au héros républicain

De la découverte de Vercingétorix au héros républicain

Vercingétorix, chef gaulois défait par les Romains a connu un destin singulier. Figure emblématique de l'histoire de France, son image a été façonnée au fil des siècles par les historiens et les pouvoirs en place successifs, pour finalement s'installer durablement dans l'imaginaire collectif et les références historiques communes. Si l'image d'Epinal demeure encore aujourd'hui dans les esprits, le héros gaulois est devenu un mythe en deux siècles, alternant et absorbant les symboliques diverses.

La singularité de Vercingétorix est peut-être liée à ce que l'essentiel des connaissances à son sujet émane de son adversaire et vainqueur, Jules César. Durant longtemps, Vercingétorix fut absent de l'histoire de France, la monarchie fondant sa légitimité sur des dynasties reposant sur Clovis, fondateur du royaume des Francs. Au XVIIIe s., Vercingétorix n'attire pas spécialement l'attention, mais les études sur les gaulois se multiplient. On retrouve Vercingétorix en héros auvergnat avec Jacques Ribauld de la Chapelle, avocat, érudit, qui rédige une Histoire de Vercingétorix. La Révolution française voit apparaître un regain d'intérêt pour le chef gaulois, à qui s'identifie le Tiers-Etat, tranchant avec la noblesse qui légitime ses privilèges par sa descendance des Francs. C'est le début de l'accession des Gaulois au statut de grands ancêtres. Puis, de 1830 à 1880 environ, Vercingétorix sort peu à peu de l'ombre et apparaît comme le premier des héros français. Les historiens comme C. Jullian ou H. Martin, s'intéressent véritablement au personnage. A travers l'oeuvre d'A. Thierry, se manifeste l'aspiration à une histoire nationale, or celle-ci ne peut se réaliser que dans l'idée de nation et de réalisation de celle-ci. L'antique gaule apparaît comme la préfiguration de la nation. En littérature, le gaulois devient un héros romantique. Les

gaulois font désormais partie de l'histoire de France.

Parallèlement au XIXe s., les historiens et érudits, notamment clermontois se passionnent pour la période gallo-romaine. Ainsi, Pierre-Pardoux Mathieu, féru d'histoire et d'archéologie consacre de nombreux ouvrages et travaux à Vercingétorix. La visite dans le Puy-de-Dôme de Napoléon III, fervent admirateur de César, et les fouilles entreprises sur le plateau de Gergovie durant cette période renforcent paradoxalement l'intérêt pour le héros gaulois. Emerge dès lors l'idée d'élever une statue à la gloire de Vercingétorix. Le projet voit le jour au sein de l'Académie des sciences, belles-lettres et arts dès les années 1860 mais la défaite de Sedan met entre parenthèse l'idée du monument et la souscription nécessaire. Durant les décennies suivantes, le concept est repris par différentes associations comme la Société d'émulation d'Auvergne. Celle-ci s'associe avec la société fraternelle des littérateurs et artistes d'Auvergne résidant à Paris. En 1885, une commission clermontoise est créée au sein de la Société d'émulation en vue d'ériger un monument, commission qui fusionne avec la commission créée à Paris. Une souscription nationale est lancée. Faute de financements suffisants, le comité chargé de la statue, sous la présidence d'Emmanuel des Essarts, doyen de la Faculté, choisit de l'installer à Clermont-Ferrand et non sur le plateau de Gergovie. Après avoir tergiversé sur l'emplacement et le modèle du monument, le projet enfin retenu est celui de la statue de Bartholdi à Clermont, sur la place de Jaude éventuellement. Tandis que la statue est entreposée dans la cour du Palais des Facultés, une maquette est transportée dans la ville sur les différentes places afin que les Clermontois décident de l'emplacement idéal. La statue est inaugurée les 10 et 11 octobre 1903 en présence d'Emile Combes, président du Conseil. Cette imposante manifestation républicaine rassemble une foule nombreuse mais donne lieu à un vif échange entre les deux journaux locaux l'Avenir et le Moniteur du Puy-de-Dôme. Si la statue obtient un large consensus, la manifestation est prétexte à un affrontement politique. L'Avenir dépeint un succès mitigé, une foule parsemée et des cérémonies émaillées d'incidents. Le banquet républicain donné à l'occasion aux Gravanches est qualifié de « four noir » et le journal en donne avec joie une vision apocalyptique. L'inauguration officielle sert de prétexte à un conflit idéologique et politique sur la politique anticléricale du gouvernement.

Faute de trouver un terrain d'entente avec la Société d'émulation d'Auvergne, l'Académie des sciences, belles-lettres et arts maintient son projet initial d'un monument à Gergovie dont elle confie la conception à l'architecte Teillard. Mais le monument installé en 1900 sur le plateau de Gergovie ne bénéficie pas d'une inauguration.

Avec la République, l'histoire devient l'un des éléments essentiels de l'éducation civique et morale. Dans les manuels scolaires de l'instruction primaire, Vercingétorix est présenté comme le héros de l'indépendance, l'incarnation de la patrie et le fondateur de la France. Mais, la Gaule est souvent décrite comme un pays peu civilisé pour qui la défaite a été bénéfique, porteuse de progrès et de la civilisation.

Le rapprochement avec la défaite de 1870 s'accentue au début du XXe s. et l'évocation de la Gaule permet d'établir un parallèle avec l'Alsace perdue. Le courage et le sacrifice de Vercingétorix sont exaltés. Certains manuels tendent à établir un lien émotionnel entre l'élève et le héros. « Pourquoi aimez-vous Vercingétorix, pourquoi devons-nous l'admirer ? »

Deux notions contradictoires coexistent sans problème : la France a fait élever une statue au héros défenseur de la Gaule, celle- ci a perdu son indépendance mais en échange a reçu la civilisation. Par ailleurs Rome est toujours exaltée dans l'enseignement secondaire. En effet, celui-ci est pétri d'études classiques où le prestige de l'Antiquité romaine est fondamental. Les gaulois sont des barbares qui n'ont laissé aucune littérature et peu de monuments.

Une renommée timide

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