« Il y a plus d'un quart de siècle que des membres de l'Académie de Clermont, et même des étrangers, ont tenté

d'éveiller des sympathies en faveur de la première, et sans contredit de la plus grande illustration de l'Auvergne.

Il a semblé jusqu'ici que les siècles aient élevé une barrière infranchissable entre une gloire ancienne, il est vrai,

mais une gloire sans tâche, et les hommages qui lui sont dus, comme si les droits du patriotisme porté jusqu'au

suprême sacrifice, pouvaient jamais prescrire. Si nos pères, croyez-le bien, avaient professé pour les

Commentaires de César, une admiration moins exclusive et plus judicieuse, l'ombre de Vercingétorix n'attendrait

pas de votre initiative, dans son pays natal, le témoignage de la reconnaissance publique. Pénétrés de l'esprit de

votre institution, vous avez regardé comme un devoir de réparer un oubli qui touche à l'ingratitude filiale. C'est par

les honneurs rendus à la mémoire des grands hommes qu'on excite l'émulation et qu'on fait naître des imitateurs

de leurs vertus. A vous reviendra le mérite d'une louable et utile réparation. […]

On convint d'une voix unanime, que le monument devait être à Gergovia, berceau de Vercingétorix et théâtre de sa

victoire. Une discussion approfondie conduisit à ce résultat pratique qu'un emblème était indispensable sur le

plateau pour faire revivre ce double souvenir dans l'esprit d'abord des étrangers puis des contemporains

nationaux. [… ]

Quelques jours après, votre commission, pour poser le fondement moral de l'édifice invoquait l'appui de l'édilité de

Clermont. Elle faisait remarquer, par une lettre collective que sur nos places et dans nos rues, rien n'éveille à la

curiosité du voyageur, le nom du guerrier qui balança la fortune du plus heureux capitaine de l'Antiquité. Pour

répondre à ce besoin, elle proposait de donner au prolongement de la rue Ballainvilliers, encore anonyme, la

dénomination d'avenue de Gergovia, et au nouveau cours qui la coupe au midi celle de Boulevard Vercingétorix. […]

(A propos du monument)

Cependant, il s'agit d'une réparation que la France attend de notre dévouement, et à laquelle sont acquises les

sympathies de toute la population de l'Auvergne et du monde savant. On a beau consigner dans des écrits, le

souvenir des événements qui changent les destinées des empires, les masses qui ne lisent pas, et dont l'éducation

se fait par les yeux perdent au bout de quelques générations jusqu'au sentiment des succès obtenus ou des revers

essuyés par leurs ancêtres : pour leur rappeler le passé, il faut parler à leurs organes. Le plâtre sous lequel on

avait essayé de présenté Vercingétorix lors de la visite de l'Empereur a popularisé autour de nous mieux que tous

les livres, le nom et la gloire du héros arverne. […]

Dans une de ces pièces (d'archives), on trouve, sous la date de l'an 8 de la République,1800, un décret envoyé dans

toutes les préfectures pour faire dresser, sur la plus grande place de la ville, une colonne à la mémoire des braves

du département morts pour la défense de la patrie et de la liberté. C'était l'inauguration d'une idée nouvelle : le

peuple conquérait son piédestal. […]

Bientôt on voyait se dresser des images vénérées. […] les témoignages de reconnaissance sont donnés sur les lieux

de leur naissance à une foule de célébrités […] le chancelier de l'Hospital à Aigueperse, Pascal et Delille à Clermont

[…] revivent à nos yeux, et ces monuments sont dus à la sollicitude des sociétés et des administrations locales. […]

Les esprits élevés et même les masses n'attendent plus qu'un signal pour concourir à l'érection d'une statue en

l'honneur de Vercingétorix. Dès 1843, M. Amédée Thierry fit porter à l'Académie la proposition d'élever un

monument à notre illustre compatriote. ».