Garde à boue ! Les vélocipédistes militaires

Bien que son usage se répande très rapidement dans la société civile après 1880, la bicyclette peine à s’imposer dans l’armée comme moyen de transport. La mise en place d’une « vélocipédie militaire » est progressive à partir de 1887 ; officiellement consacrée par circulaire ministérielle en 1892, elle ne détrônera jamais la cavalerie. Elle constitue cependant une « niche » pour les sportifs cyclistes amenés à réaliser leur service militaire…


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© Arch. dép. Puy-de-Dôme, photo Jean Lebon, 581 Fi 254.

 

 

 

 

Soldat du 16e Régiment d’Infanterie (Clermont-Ferrand), posant fièrement à côté de sa bicyclette. Il porte sur son bras gauche le brassard réglementaire avec bicyclette brodée, attestant de sa fonction de vélocipédiste militaire (en drap rouge pour les caporaux, brigadiers ou soldats, en or ou argent pour les sous-officiers).


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Arch. dép. Puy-de-Dôme, affaires militaires, R 708.

 

 

 

Entre 1887 et 1895, date du règlement définitif organisant les services vélocipédiques militaires, la « petite reine » est mise à l’essai lors des manœuvres, pour trois emplois : estafette, éclaireur et combattant. Elle se révèle alors parfaitement adaptée à la transmission rapide des ordres et informations, dès lors qu’elle circule sur route ou chemin carrossable ; en revanche, elle s’avère inappropriée pour les manœuvres des éclaireurs ou pour les combats. En 1887, sont convoqués tous les réservistes (et territoriaux si l’effectif des réservistes n’est pas suffisant) ayant déclaré posséder « un bicycle, une bicyclette ou un tricycle, à la seule condition que l’instrument soit solide et en bon état ». Ce banc d’essai qui se fait donc, dans un premier temps, à peu de frais pour l’armée… les candidats vélocipédistes devant fournir et entretenir leur propre matériel – contre indemnité compensatoire journalière –, sans prétendre par ailleurs à quelconque avancement de grade.

 

 

Circulaire du Général Boulanger, commandant de la 13e Armée, adressée aux préfets, afin de débuter l’expérimentation de la vélocipédie militaire, 21 juillet 1887.


Après 1892 l’État prévoit toutefois l’acquisition d’un parc cycliste, affecté principalement à ses corps de troupe et pour tout soldat de l’armée active souhaitant exercer cette fonction. Chaque corps régimentaire peut par ailleurs acquérir à ses frais son propre parc (constitué de modèles agréés et fabriqués par l’État) qu’il loue ensuite à ses officiers.


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Vélocipédistes militaires en colonne de marche (vers 1900). © Arch. dép. Puy-de-Dôme, prêt Louis Saugues, 507 Fi 3702.


Les vélocipédistes militaires sont recrutés au terme d’un examen médical, et surtout d’une épreuve sportive à caractère éliminatoire (de 48 à 90 kilomètres à effectuer dans un temps imparti : 48 kilomètres pour tout corps régimentaire, 90 kilomètres pour une affectation à l’état-major) favorisant ainsi « les hommes ayant l’habitude de ce genre de sport avant leur entrée au service ». Ces derniers sont d’ailleurs encouragés à présenter leur palmarès de courses ou diplômes obtenus dans les concours ou auprès des diverses sociétés vélocipédiques. Ils doivent enfin justifier auprès de la commission d’admission d’une instruction primaire élémentaire (lecture, écriture, calcul), et de l’usage pratique d’une carte routière. L’obtention du brevet de vélocipédiste est ensuite mentionnée sur leur livret militaire et sur les registres matricule.


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© Arch. dép. Puy-de-Dôme, 545 Fi 1823.

 

 

 

Groupe de musiciens et cycliste (conscrits ?) à Vollore-Ville. Les mentions « vélocipédiste » ou « musiciens » sont portées sur livret militaire du soldat et dans le détail des services sur les registres matricule (extrait, classe 1897, subdivision de Riom).


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Extrait du registre matricule du bureau de Riom, classe 1897, affaires militaires. Arch. dép. Puy-de-Dôme, R 3350.

 

 

Certaines qualifications sont très recherchées dans l’armée. Celles de maréchal-ferrant, de tailleur ou d’armurier sont bien connues… celle de vélocipédiste, moins ! Au même titre que les musiciens, dont le clairon et le tambour permettent de rythmer les manœuvres et apportent leur soutien à la transmission des informations, les vélocipédistes occupent un poste-clé dans la transmission rapide et discrète des ordres, ce qui les dispense parfois des tâches ordinaires de la vie de caserne…




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