Le permis de conduire avant le permis de conduire

« Nul ne pourra conduire un automobile s’il n’est porteur d’un certificat de capacité délivré par le préfet de département de sa résidence sur l’avis favorable du service des Mines ».

Le 10 mars 1899 est promulgué le premier décret entièrement dédié à la règlementation administrative de la circulation des automobiles. Les inquiétudes suscitées par l’apparition sur les routes de ces véhicules, rapides et bruyants, engagent l’administration à étendre son contrôle sur ces nouvelles machines mais aussi sur leurs conducteurs… Il y a 120 ans naissait le permis de conduire !


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Certificat de capacité délivré à Mlle Céline Chaumont en 1907.
Arch. dép. Puy-de-Dôme, série S « Travaux publics et transports », service des Mines, S 5652.


L’instauration des certificats de capacité à la conduite (1899 et 1901) est indissociable de la règlementation établie pour l’usage des voies ouvertes à la circulation.

On se préoccupe naturellement d’une règlementation de la circulation bien avant la naissance de l’automobile : la loi organique du 30 mai 1851, qui codifie les précédents textes en vigueur, constitue la première législation globale de la circulation routière, ou « police du roulage et des messageries publiques » ; c’est elle qui permet par exemple d’imposer en 1852 la conduite à droite et le droit de partage de la route par moitié.


Le décret de 1899 introduit une réglementation propre aux véhicules automobiles. Repris et modifié dès 1901, il adapte la réglementation à la rapide évolution technologique de ces véhicules motorisés. Un rapport du ministre des travaux publics Pierre Baudin visait particulièrement leur vitesse (dépassant trop fréquemment la limite des… 30 km/h !) et la multiplication des modèles aux mécanismes parfois… expérimentaux ! Ainsi, le décret s’attache particulièrement à la vérification par le service des Mines des points de sécurité de l’automobile (freinage, visibilité, maniabilité, solidité de l’assemblage des pièces) afin de définir et homologuer des modèles, sur la base de leur poids et de leur puissance, en partenariat avec les constructeurs. L’article 5, par exemple, impose aux constructeurs l’installation d’un système de marche arrière pour les véhicules de plus de 350 kg à vide, ainsi que la pose de plaques d’immatriculation délivrées par les Mines (ou plaques… minéralogiques) pour les véhicules pouvant atteindre, par paliers, une vitesse supérieure à 30 km/h (pour l’arrondissement minéralogique de Clermont-Ferrand, l’immatriculation porte la lettre F).


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Extrait du premier registre de délivrance des certificats de capacité à la conduite des automobiles (années 1901-1904). Arch. dép. Puy-de-Dôme, M 60040.


En revanche, le décret ne livre aucune indication sur la nature de l’examen auquel est soumis le futur conducteur. Le décret stipule seulement qu’il devra s’assurer du bon état de son véhicule, « vérifier fréquemment par l'usage le bon état de fonctionnement des deux systèmes de freinage » et « rester constamment maître de sa vitesse ». Il en va de la responsabilité du conducteur de garantir de la sécurité des autres usagers des voies publiques (éviter des accidents, explosions, etc., prévenir en cas de danger).

Il faut attendre le décret du 31 décembre 1922 pour que soient précisées les modalités d’attribution du permis, créé par son article 29, délivré par un « expert accrédité par le ministère des Transports » (et non plus par un agent du service des Mines), fixe un âge minimum (18 ans pour les automobiles, 16 ans pour les motocycles à deux roues), met en place un permis spécifique aux véhicules de transport en commun et poids lourds (plus de 3000 kg) et prend des mesures de suspension ou d’annulation du permis. Les examens sont alors organisés avec l’Union Nationale des Associations de Tourisme (qui mandate leurs experts).


Quelques certificats de capacité (non délivrés ou retournés par leur détenteur ?) ont été retrouvés insérés dans le registre de gestion des autorisations de mise en circulation des véhicules (futures cartes grises) et de vérification de certificats de capacité, provenant du service des Mines, qui assure à la fois la certification technique de la voiture et délivre le certificat de capacité à la conduite. La Préfecture se charge ensuite de la délivrance du certificat final (le fameux « papier rose » !) au titre de la police administrative.


Le lecteur trouve donc ces documents aux Archives départementale dans deux sous-séries : la sous-série 4 M, « Police de la route », regroupe les registres de délivrance des certificats de capacité à la conduite des automobiles de 1901 à 1936 ; la sous-série 2 S, « Routes ou grande voirie. Circulation et transports routiers », très riche, comporte les premiers registres de certificats de capacité et d’immatriculation.


Certificat de capacité à la conduite d’une voiture avec moteur à pétrole délivré à Mlle Céline Chaumont (1907).

Arch. dép. Puy-de-Dôme, série S « Travaux publics et transports », service des Mines, S 5652.




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