Au début du XX^e siècle, Alexandre Petit, médecin-major des mobilisés du Puy-de-Dôme établi à Royat après la guerre de 1870, fait l’acquisition d’une auberge difficile d’accès, sur les hauteurs de Royat. Sous la férule de ce passionné d’archéologie est érigé le Paradis, qui surplombe la vallée de la Tiretaine. Mais l’histoire de ce lieu ne se limite pas au célèbre restaurant homonyme...

Au milieu du XIX^e siècle, le thermalisme mondain prend son essor à Royat avec l’exploitation des nombreuses sources aux multiples vertus bénéfiques pour les voies respiratoires et les fonctions cardiaques. L’arrivée d’une nouvelle clientèle toujours plus nombreuse entraîne la création de lieux de loisirs (théâtres, casino) et d’hébergements de luxe. La liaison ferroviaire et la station de tramway, aménagées à la fin des années 1880, désenclavent enfin la cité thermale

C’est pour contribuer au bien-être de ces nouveaux venus qu’Alexandre Petit fait construire un établissement d’après-cure, adossé à l’ancien hôtel de l’Observatoire, auberge en activité entre 1870 et 1890 environ. Il lui donne le nom de « Paradis », par opposition au quartier du Creux de l’Enfer, situé de l’autre côté de la vallée de la Tiretaine et où furent inhumées les victimes de la peste de 1631, mais aussi pour exprimer la sérénité qui émane de la vue incomparable sur la ville.

La vieille bâtisse est métamorphosée par l’adjonction de terrasses et de pergolas, d’une tour et d’un étage supplémentaire ; elle compte ainsi près de 70 fenêtres. L’arkose mise en œuvre dans la construction, extraite de la carrière du puy Chateix toute proche, s’harmonise avec les coteaux couverts de vignes et de vergers. Son propriétaire envisage même une liaison par funiculaire avec la place Allard, centre névralgique de l’activité thermale… mais ce projet ne sera pas finalisé.

La construction nécessite des travaux colossaux ; lancés en 1903, ils ne s’achèvent qu’en 1908. L’imposant bâtiment est conçu avec le concours de l’architecte clermontois Louis Jarrier, auquel on doit notamment la verrière de la buvette Eugénie, la villa aujourd’hui occupée par l’office de tourisme de Royat-Chamalières, ou encore la façade de la pâtisserie du Trianon à Clermont-Ferrand.

Du début du XX^e siècle jusqu’à l’entre-deux guerres, le Paradis propose aux curistes et touristes des après-midis thé dansants ou musicaux. À la Libération, des déportés rescapés des camps de concentration et des prisonniers de guerre y trouvent un lieu de répit. Un centre de rééducation s’y installe en 1945 ; au début des années 1950, c’est un centre de rééducation et de formation pour personnes atteintes de pathologies cardiaques qui y voit le jour, sous l’impulsion de la municipalité et avec l’accord du ministère du Travail.

La majesté du site inspire un illustrateur de cartes postales, auteur d’aquarelles de La Rochelle ou Saint-Malo sous le pseudonyme « Barday ». Il est fort probable que la vue réalisée par le photographe-éditeur Jean Gouttefangeas vers 1920 ait inspiré sa peinture du Paradis. L’artiste, sans-doute de passage à Royat, a trouvé en Alexandre Petit un féru d’art, de voyages, et de photographie.

Bibliographie :

Piéra (Pascal). Louis Jarrier : architecte à Clermont-Ferrand (1862-1932). Clermont-Ferrand, Étude du Patrimoine Auvergnat, coll. Œuvres d’architectes, 1995. (3 BIB 2911)

Vernet (Robert), Georges Tiple. Royat et ses environs. [Tours], éditions Sutton, coll.Mémoires en images, 2005. (2 BIB 15683)

Cyprien (Claudie) [et al.]. Royat entre Sources et Volcans : 2000 ans d’histoire. [Royat], Ville de Royat, cop. 2006. (3 BIB 2275)

Le Paradis. Carte postale, éditions Gouttefangeas d’Olliergues

Arch. dép. Puy-de-Dôme, fonds Gilbert Rouchon, 10 Fi 2010