Monsieur Truc cherche un scénario : histoire d'un « film-club »

Des années 1930 aux années 1960, les caméra-clubs sont en France, pour les passionnés de cinéma amateur, des lieux majeurs de formation et d'échanges. Dans ce paysage, le premier caméra-club de Clermont-Ferrand est singulier : il est lié à une association originellement dédiée à la photographie.



Les Amateurs photographes d'Auvergne (APA) ont durant les années 1930 une activité photographique régulière ; le cinéma, vu comme une curiosité technique et un passe-temps d’« originaux », y est très rarement à l’honneur. Lorsqu'en décembre 1942 Paul-Louis Jausions (1903-1984) est élu président, la tendance change : s'il pratique la photographie, c'est aussi un cinéaste amateur prolifique et réputé, dont les films (Vent, 1935, Sous le signe de Lubin, 1936, etc.) ont déjà captivé les membres des APA.

 

L'assemblée générale du 8 juillet 1947 franchit un pas symbolique : le nom de l'association devient APCA (Amateurs photographes et cinéastes d'Auvergne) ; est créée une section spécifiquement consacrée à la pratique du cinéma, dont le président et animateur, Amaury Laurentin (1908-2002), est élu trois mois plus tard.

 

Parmi les premiers travaux décidés figure la réalisation d'un « film-club ». Une équipe de passionnés se met au travail durant l’hiver qui suit. La mise en scène est confiée à un photographe de métier d’origine vellave, René Machabert (1908-1975) ; installé à Clermont-Ferrand depuis la fin des années 1930, c’est un cinéaste amateur chevronné et déjà réputé sur la place clermontoise. Le scénario définitif et le découpage du film sont arrêtés en février 1948. Son intrigue, tout comme son titre annoncé par le bulletin de mars, Monsieur Truc cherche un scénario, sont résolument tournés vers une difficulté récurrente du cinéma d’amateurs : trouver un sujet de film.

 


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Arch. dép. Puy-de-Dôme, 102 J 11

Le tournage se déroule du 21 mars au 20 juin 1948. La caméra Bolex H16 (format 16mm.) suit Monsieur Truc (Maurice Boucher) qui, après avoir reçu sa carte de membre au siège des APCA, rue Montlosier, provoque plusieurs incidents dans les rues et jardin de Clermont par son insistance à vouloir « voler » des images. Désespéré, il s’installe au zinc du « Club », rue d’Assas, d’où, par l’entremise de Monsieur Bizarre (Lucien Bongheat), il est « jeté » dans un récit onirique et angoissant. Dès lors, il va chercher dans le rêve – la fiction – ce qu’il ne trouve pas dans la réalité – le documentaire.

Tournage de Monsieur Truc sur les bords de l’Allier aux alentours de Cournon-d’Auvergne [de gauche à droite : Maurice Boucher, un cinéaste anonyme, Amaury Laurentin (debout, à la caméra), René Machabert] / anonyme (23 mai 1948).


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Affiche du Gala de cinéma d’amateurs du 29 décembre 1948 (1948). Arch. dép. Puy-de-Dôme, 102 J 10

 

Achevé à l’automne, le film est projeté en avant-première du premier Gala du cinéma d’amateurs organisé par le club le mercredi 29 décembre 1948. Un « très nombreux public », d’après le bulletin de janvier 1949, se déplace salle Saint-Genès au 9, place Michel-de-l’Hospital (en face de l’actuel Centre de documentation « La Jetée »). 1948 et Monsieur Truc cherche un scénario marquent ainsi les débuts d’une activité cinématographique intense au sein des APCA, et d’une franche émulation autour du cinéma d’amateurs dans le département, dont témoigne le fonds de l’association déposé aux Archives départementales du Puy-de-Dôme en 2002.


 

Monsieur Truc cherche un scénario (1948).

Arch. dép. Puy-de-Dôme, 11 AV 2

Visionnez le film "Monsieur Truc cherche un scénario"




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